LA SÉRIGRAPHIE

par Louise Lépine

This part 1 of 2 parts. Volet 1 de 2 : les étapes.

Lorsque je vais aux expositions de l’OGPC je constate que bien peu d’entre nous ne s’adonnent à l’art de la sérigraphie. Est-ce parce que l’on pense que la sérigraphie ne sert qu’à imprimer des T-shirts ? Ou est-ce tout simplement parce que l’on ne s’est pas arrêté à connaître cette technique ?

L’article qui suit vous donnera une définition des étapes qui mènent à la création d’une sérigraphie. Cet article sera suivi, le mois prochain, par un survol de chacune de ces étapes ainsi qu’une liste des outils vous permettant de vous équiper et de monter votre studio.

QU’EST-CE QUE LA SÉRIGRAPHIE? C’est « une technique d’impression par laquelle on applique une mince couche d’encre, selon un motif défini, sur une feuille de papier ou tout autre support placé en dessous d’un écran. La raclette presse alors l’encre qui traverse les ouvertures de la trame du tissu tendu de l’écran. Le motif est délimité par le clichage qui consiste à boucher la trame du tissu là ou l’encre ne doit pas traverser. »

LE CLICHAGE : Plusieurs techniques peuvent ici être utilisées afin d’obstruer les parties de l’écran qui ne doivent pas être imprimées : papier-pochoir, film de découpe, liquide de remplissage etc. Personnellement je favorise le procédé photographique. « Le bouche-pores utilisé est une émulsion sensible à la lumière qui a la propriété de durcir lorsqu’elle est exposée à la lumière, devenant ainsi insoluble à l’eau. On délimite le motif à imprimer par exposition de la couche d’émulsion qui est mise en contact avec une feuille d’acétate transparente sur laquelle le dessin a été opacifié. Ces zones opaques empêchent les rayons ultra-violets d’atteindre l’émulsion qui se dissoudra à l’eau alors quel les zones exposées se durciront et deviendront l’élément qui bouchera le tissu pour empêcher le passage de l’encre. »

LES ENCRES : « les encres et peintures sérigraphiques sont préparées à partir de pigments dont la granulation varie entre 5 et 10 microns. Les tissus les plus fins … représentent une ouverture de mailles de 25 microns : ce qui revient à dire que les encres passent facilement à travers les mailles…on ne peut employer n’importe quelle sorte de peinture en sérigraphie. »

L’opacité ou la transparence des couleurs ainsi que la juxtaposition et la superposition des plans de couleurs sont déterminées par les effets de profondeurs de légèreté etc. désirés.

L’IMPRESSION : L’écran est fixé par des charnières sur la base d’impression (une table). Le support est placé sous l’écran. L’encre est déposée sur le haut de l’écran. À l’aide d’une raclette l’encre est distribuée sur la surface de l’écran.

 REPÉRAGE : Il est essentiel de développer un système de guidage qui permettra de déposer le support (papier) au même endroit pour qu’il y ait « une parfaite similitude des impressions du tirage. Pour cela on pose des guides ou taquets contre lesquels le papier vient buter quand on le place pour l’impression. »

RÉCUPÉRATION DE L’ÉCRAN : Il faut nettoyer rapidement l’écran afin que l’encre ne sèche pas et n’obstrue pas les mailles de l’écran. On enlève d’abord le surplus d’encre qui se trouve sur l’écran au moyen d’une spatule. Ensuite à l’aide d’un solvant on dissout les films et autres produits utilisés pour boucher les pores. L’écran est finalement nettoyé à l’eau et mis à sécher pour une utilisation ultérieure.

Traduction:

Raclette: squeegee

Clichage: blocking out

Ecran: screen frame

Trame: screen mesh

Encres: ink

Pochoir: stencil

Impression: pressing the ink against the mesh into the paper

Récupération: cleaning the screen.

Serigraphy (Part 2)

This is the second part of a two-part article on silkscreen printmaking by Louise Lépine.

Vous trouverez ici un survol de l’équipement nécessaire à la réalisation de sérigraphies.  La description de l’usage de cet équipement, bien que non exhaustive, vous donnera un aperçu de leur utilisation.  J’ajoute des commentaires sur mon expérience et mes préférences pour certains matériaux ainsi que la mention de quelques commerces où je m’approvisionne.  En fin de texte vous trouverez en Annexe 1 un tableau qui contient les photos qui illustrent plusieurs des éléments dont je discute dans le texte. L’Annexe 2 est né plus tard quand on m’a demandé des précisions sur ma table de sérigraphie construite pour mes besoins.

Vous remarquerez que je favorise les commerces canadiens et que j’évite les multinationales. Il va sans dire que l’artisan[1]  néophyte est encouragé à suivre un cours qui le guidera dans son apprentissage.  D’excellents cours sont donnés à l’École d’art d’Ottawa.

Le cadre (aussi appelé l’écran) sur lequel la trame est tendue peut être de bois ou de métal.

Bien que le cadre de bois puisse être fabriqué à peu de coût par un artisan et qu’on le retrouve facilement dans le commerce, on a constaté à l’usage que ces cadres se déforment et que de ce fait la trame se détend.  Mieux vaut donc s’équiper de cadre en métal : ils sont légers et durables et la trame demeure bien tendue.

La dimension d’un cadre est déterminée à partir de l’intérieur du cadre.  On doit prendre en considération la dimension de l’image à imprimer et ajouter un espace additionnel au périmètre, qui permettra de déposer la raclette et le surplus d’encre. Il faut aussi prendre en considération la grandeur de l’évier dont on dispose pour le dépouillement de l’écran.

J’achète mes cadres et les fais réparer au besoin dans ce commerce torontois https://www.gsdye.com/screen-equipment.html. À noter que les cadres pour imprimer sur le tissu ont une trame moins fine que ceux qu’on utilise pour imprimer sur du papier.  On utilise généralement des cadres No 110 pour le tissu et No 230 pour le papier.

Le clichage – Bien que l’on puisse utiliser un pochoir, des liquides de remplissage comme les bouche-pores etc… la technique que j’ai apprise à l’Université, l’émulsion photosensible, demeure ma préférée.  J’ai longtemps utilisé les produits de marque « Speedball » constitués de photo émulsion et d’un sensibilisateur communément appelé Diazo.  Ces deux composantes, lorsque mélangées, doivent être utilisées dans les trois mois. Présentement j’utilise un produit mélangé à l’usine et que je peux conserver un an.  Le site : http://metrographicsupplies.com/  vous informera sur les variantes de ce produit et le personnel du service à la clientèle pourra vous guider judicieusement.

L’émulsion photographique est appliquée sur l’écran avec l’instrument qui tient de la raclette et d’un récipient, le « scoop coater ». Puis on laisse  sécher l’écran à la noirceur.  J’ai acheté mon « scoop coater » en même temps que mes écrans et ma raclette :  https://www.gsdye.com/screen-equipment.html

L’image à imprimer– L’image peut être un dessin ou même une photo[2].  Elle doit être transférée sur un acétate.  Pour éviter des frais, on peut imprimer l’image à partir d’une photocopieuse.  Il suffit de mettre quelques gouttes d’huile sur le papier imprimé et voilà!

Peu importe, acétate ou papier, il est essentiel que cette image soit d’un noir profond.

L’exposition à la luminière – L’artisan peut obtenir de très bons résultats à partir d’un équipement rudimentaire : une source lumineuse, une vitre sur laquelle on dépose l’image, l’écran photosensible, une planche qui recouvre l’écran et un poids pour assurer un bon contact.   Le temps d’exposition à la lumière dépend de la lampe utilisée.   J’expose mon image sur une table conçue par mon mari (voir photos en Annexes 1 et 2).  Libre à vous d’en construire une semblable.

Dans son livre, L’art de la sérigraphie, Louis Desaulniers[3] illustre bien les composantes d’un tel appareil (CF annexe).

Les encres – Il est facile de composer ses propres couleurs : le rouge, jaune, bleu, noir et blanc suffisent amplement.  Ici encore les produits « Speedball » se retrouvent sur toutes les étagères.  En plus des couleurs, il est utile de s’équiper de produits qui donnent de la transparence à nos encres[4], ou encore d’en augmenter le volume lorsque nous constatons qu’il nous reste peu d’encre pour terminer une impression.

Mais, si on veut des couleurs hors de l’ordinaire, je vous recommande d’utiliser celles de  « Wallace Seymour».  En y ajoutant du « Screenprinting Paste », ces encres s’adaptent parfaitement à la sérigraphie.  Vous les retrouverez exclusivement chez le commerce Select Fine Arts Materials à Orléans.  https://selectfineartmaterials.com/

L’impression – Il est primordial que le cadre soit stable.  Pour ce faire il suffit de le fixer à une table au moyen de charnières à sérigraphie.  https://www.gsdye.com/screen-equipment.html

L’encre est distribuée sur la surface de l’écran au moyen d’une raclette :  https://www.gsdye.com/screen-equipment.html

Le support/le papier doit être lisse et absorbant.  Le papier BFK Rives est largement utilisé pour la sérigraphie.  Il est important de le prendre suffisamment épais (250g/m²) afin de faciliter la manipulation. 

Récemment j’ai utilisé un papier fait au Canada  à la Papeterie St-Armand de Montréal.  Là encore on le retrouve chez Select Fine Arts Materials.

Le repérage – Assurez-vous, à l’aide d’onglets, que le papier reste dans la même position à chaque succession d’impressions des pochoirs et/ou d’images transférées sur acétate.

Le dépouillement de l’écran – Il est primordial de ne pas laisser sécher l’encre sur l’écran. Donc, dès que vous avez terminé d’encrer votre dernière épreuve, passez l’écran sous l’eau jusqu’à ce que les mailles correspondants à l’image à imprimer soient ajourées. Sécher ensuite l’écran.  Vous pourrez alors imprimer l’image à nouveau.

La récupération de l’écran – Immédiatement après avoir encré, il faut enlever le surplus d’encre puis enlever l’émulsion photographique à l’aide d’un produit spécialement conçu à cet effet.  Passer ensuite l’écran sous l’eau.  http://www.thescreenprintstore.ca/categories/Screen-Reclaimers/

Il est recommandé d’utiliser un jet d’eau puissant afin d’éliminer tout trace d’encre et d’émulsion.  Il est facile de respecter cette directive lorsque l’on a un atelier muni d’un grand évier ou encore lorsque l’on peut effectuer cette opération à l’extérieur.  En été, j’utilise mon nettoyeur à haute pression mais, en hiver, avec de bons produits et un pommeau à douche qui offre une bonne pression, dans un évier assez grand pour recevoir le cadre employé, j’arrive aisément à récupérer mes écrans.


[1] Dans le présent document, les termes employés pour désigner des personnes sont pris au sens générique; ils ont à la fois valeur d’un féminin et d’un masculin. [2] L’œuvre « Bons baisers d’Australie », en Annexe 1, a été réalisée à partir d’une photo.  De plus, on remarquera ici la technique du chine-collé. [3]  Louis Desaulniers, L’art de la sérigraphie, 1976, Les Presses de l’Université du Québec, p.133. ISBN 0-7770-0170-5 [4]  J’ai abondamment utilisé la transparence dans mes premières sérigraphies comme en témoigne « Au-dessus de l’étang » mis en Annexe 1.